Lorsque je dis que je suis sculpteur, je devrais dire que je suis modeleur.
     Je travaille la terre dans l'instant, comme je fais de l'aquarelle ou du lavis d'ailleurs. Ces techniques ont en commun d'utiliser une matière diluée, molle et malléable. C'est une sensation qu'il faut donner, trop travaillée cela devient peiné...

    Je dis en schématisant que les sculpteurs se divisent en deux grandes catégories, les sculpteurs éoliens comme Arp, et les sculpteurs telluriques comme Rodin. Les premiers usent, polissent la forme. Ils l'assouplissent jusqu'à la rendre mobile. Sous les doigts des seconds, la matière grumelle, fermente et explose comme la terre sous l'action d'un  phénomène volcanique.
     Il est curieux pourtant que l'Iris de Rodin, faite de terre, la matière cahoteuse et la forme  agile soit une Iris aérienne, alors que Jean Arp parle de "Concrétion" pour définir son travail.                     
   On retrouve cette référence à la "coagulation"¹ et la "solidification"¹ dans Outrance d'une outre mythique, Chapeau fort, et Concrétion humaine. Et en effet, son art "concret" s'apparente à la germination d'une plante : la force germinative poussant  comme pour sortir d'une gangue et donnant la forme : "surfaces animées d'ondulations répétées et de creux fluides"¹.

¹dans Jean Arp, "Sculptures, reliefs et papiers de 1913 à 1966", Catalogue d'une exposition itinérante,1992-1994